Nous avons découvert cette région par hasard, lors d'un été où nous ne savions pas vraiment où aller et où les finances étaient limitées. Ma mère avait un frère dans le coin, mais ils ne se voyaient que rarement. Mon oncle, d'apparence distante, s'est révélé être d'une chaleur surprenante. Nous avons passé un après-midi ensemble, et alors que nous nous apprêtions à partir, mon regard s'est posé sur une grande cabane au fond du jardin. Intrigué, il m'a confié :
- C'est là que se trouve toute ma vie.
Je suis revenu seul pour le voir, sans mes parents. Rapidement, il m’a emmené au fond du hangar. Ce que j’ai découvert m’a laissé sans voix. Sur plusieurs tables, il avait créé un paysage miniature impressionnant qui occupait presque tout l'espace disponible, ne laissant qu’un passage étroit.
- C’est l’œuvre de ma vie, a-t-il ajouté.
J’avais déjà vu des trains miniatures auparavant, mais celui-ci était différent. Sur les étagères se trouvaient une collection de trains miniatures que mon oncle faisait circuler sur les rails à sa guise. Il m’a même fait une démonstration avec un de ses trains, en me disant qu’il était spécial, bien que je ne comprenais pas pourquoi à ce moment-là.
Durant les deux semaines restantes de vacances, je suis retourné chez lui plusieurs fois. Il m’a fait visiter la ville, mais ce qui m'attirait le plus, c'était son train miniature. Un matin, je l’ai appelé pour lui demander s’il était chez lui l'après-midi. Il m’a répondu qu'il devait voir un ami, mais qu'il laisserait la clef sous le paillasson pour moi.
Quand je suis arrivé, j'ai retrouvé le décor intact. J’ai pris un train sur l’étagère et l’ai placé sur les rails, puis je l’ai mis en marche. Alors que le train avançait, j’ai remarqué quelque chose de stupéfiant. Les personnages miniatures qui peuplaient le décor étaient vivants et se livraient tous à une seule activité : faire l'amour. Fasciné par cette scène irréelle, je me suis penché pour mieux voir. Les détails étaient incroyablement précis, presque trop réalistes pour être une simple maquette.
Le soir, j'ai évoqué ma visite à mon oncle. Il a souri, comme s’il savait exactement ce que j’avais vu.
- Tes trains sont spéciaux, lui ai-je dit.
- Ils ont le pouvoir de matérialiser ce que nous sommes, nos pensées, nos rêves, a-t-il répondu, sans en dire davantage.
Je suis revenu le lendemain pour m'assurer que ce que j'avais vu n'était pas une illusion. En démarrant à nouveau le train, les mêmes scènes ont repris vie, mais avec des personnages différents. Il semblait que mes pensées influençaient ce qui se déroulait dans ce monde miniature, jusqu'à ce que je me retrouve littéralement immergé dans ce décor, où les plaisirs charnels régnaient en maîtres.
Les semaines suivantes, j’ai passé beaucoup de temps dans ce hangar, explorant cet univers où mes désirs les plus secrets prenaient vie. Cependant, après le décès de mon oncle en novembre, j'ai récupéré ses maquettes et ses trains, espérant revivre cette expérience chez moi. Mais tout ce qui restait n'était que des modèles réduits ordinaires. Le mystère, le charme, tout était parti avec lui.